Publié le 16-08-2022
Dépôts à vue des étrangers non résidents: Ezzeddine Saidane tire la sonnette d'alarme
« Comment faire des prêts à l’État sur 3 à 5 ans à partir de dépôts à vue (donc exigibles à tout moment) appartenant pour l'essentiel à des clients étrangers non-résidents », dénonce Ezzedine Saidane dans un post publié sur sa page Facebook officiell.
« Au lieu d’engager les réformes nécessaires, s’est mis à chercher d’autres formes d’emprunt afin de satisfaire un appétit insatiable des finances publiques tunisiennes pour toutes formes de financements. En 2018 l’État tunisien empruntait sur le marché financier International avec une marge de l’ordre de 6%. En même temps les banques tunisiennes géraient des dépôts en devises à vue appartenant essentiellement à des clients étrangers non résidents. Il faut souligner là deux termes clés « à vue » et « clients étrangers non résidents ». Ces dépôts étaient placés par les banques à des taux très faibles, autour de 1%. Et les banques n'offraient et n'offrent toujours aucune rémunération à leurs clients », a expliqué l’expert économique dans son post.
Il a annoncé qu’en 2018 il avait été proposé à l’État d’emprunter en devises auprès des banques tunisiennes sur des durées allant de 3 à 5 ans à des marges d'intérêt de 2 à 3%. L’opération était justifiée par une logique de gagnant- gagnant. L’État empruntait moins cher que sur le marché financier International et les banques gagnaient davantage.
Selon lui, ce qui avait été négligé dans ce processus c'étaient les principes de base de gestion prudente de la liquidité bancaire .
« Dés la mise en place de la première opération du genre pour un montant (en Euros et en Dollars) équivalent à 1,5 milliard de Dinars j’avais alerté le Ministre des finances par écrit et verbalement sur la gravité de cette forme de financement sur la gestion de la liquidité en devises des banques… Je lui avais conseillé de ne plus recourir à un tel financement. », a-t-il dit.
Il a ajouté que la BCT, responsable de la supervision bancaire, et notamment de la gestion rigoureuse de la liquidité par les banques aurait dû s’opposer à cette opération. « Au lieu de s’y opposer la BCT avait autorisé l’opération et le Gouverneur de la BCT avait assisté à la cérémonie de signature et l’avait applaudie. Cette opération de financement avait été suivie de cinq autres opérations du même genre, toujours en Euros et en Dollars, pour atteindre l'équivalent d'environ 7 milliards de Dinars !!! Les six opérations étaient autorisées et applaudies par la BCT », a-t-il souligné.
Ezzeddine Saidane a fait savoir que, vue la crise des finances publiques, l’État n’a remboursé aucun de ces crédits. À chaque échéance de remboursement l’État demande aux banques un nouveau prêt pour rembourser celui qui est arrivé à échéance. Autant dire que le système bancaire tunisien se trouve aujourd'hui piégé par une série de prêts en devises financés par des dépôts à vue appartenant essentiellement à des clients étrangers non-résidents, et que l’État ne rembourse pas.
« si un jour l’État décide de rembourser ces prêts, ce remboursement se traduirait par une baisse très importante des réserves de change du pays. Ceci nous fournit une autre preuve pour dire que les réserves de change, telles que calculées par la BCT et exprimées en nombre de jours d’importation, sont largement surestimées. Les réserves de change de la Tunisie seraient en effet déjà largement en dessous de la ligne rouge de 90 jours. En plus de cela il faudrait tenir compte des factures impayées de certaines entreprises publiques vis-a-vis de leurs fournisseurs étrangers (par exemple la Pharmacie Centrale pour plus de 800 millions de Dinars). Le paiement de ces factures viendrait en déduction des réserves de change telles qu’affichées par la BCT !!! », lit-on dans le post publié sur Facebook.